Ce week end dans le Perche, j’ai partagé un instant d’authenticité avec les meuniers du Moulin de la Peltrie.
Ce matin j’ai rendez vous avec le meunier du Moulin de la Peltrie à Bivilliers, sur la route entre Tourouvre et Mortagne-au-Perche. Philippe, en effet, a généreusement accepté de me raconter son histoire et m’expliquer les secrets de fabrication de son pain d’exception. Me voici donc dans la cour du Moulin, je pénètre dans le fournil.
…cette odeur du pain chaud, chargée de promesses, littéralement me submerge.
Philippe est au travail depuis plusieurs heures déjà.
La première fournée est en train de cuire. Pendant que Philippe prépare la seconde avec des gestes surs et les sens en alerte, je l’observe et j’écoute.
Il me raconte sa reconversion, sa recherche de liberté et de sérénité. La quête commence. Comment en 2001, avec son ami Jean, ils décident ensemble de reprendre le Moulin dans le but de poursuivre l’activité de meunerie. Les deux hommes, animés par la même passion, connaissent leur sujet et, rapidement, créent différentes farines et recettes de pain. On leur doit notamment la Baguette du Perche que l’on trouve désormais sur les bonnes tables new yorkaises ou tokyoïtes.
Vient alors cette décision de se tourner vers des farines issues de l’agriculture biologique et de transformer leur farine en pain. La quête se poursuit.
Le four à bois construit en 2008 par les « Fours Voisins » et dont la réputation n’est plus à faire, est impressionnant.
Bâti en briques réfractaires, à chauffe directe au gueulard, avec deux étages de 8m² chacun, construction manuelle brique après brique, tapis d’enfournement…il faut ce qu’il faut pour mériter la véritable appellation « pain cuit au feu de bois ». Mais on n’enfourne pas n’importe quelle pâte dans un tel chef-d’œuvre.
Le savoir faire de la fabrication du pain selon des procédés authentiques, pourtant vieux de trois mille ans, s’est perdu. Philippe se transforme alors en alchimiste, la quête continue.
…et encore cette odeur du pain chaud, emplie de réconfort, et qui m’envahit
Les grains en premier lieu, broyés sur meule de pierre afin de laisser à la farine toutes les qualités nutritives des céréales, l’eau de source provenant vraisemblablement de la même nappe que celle de l’Abbaye de la Trappe, le sel de Guérande estampillé « Nature et Progrès », le levain artisanal fabriqué par Philippe au laboratoire, le temps de fermentation de la pâte. Bannis gluten, levure et autres additifs que le « progrès » nous a apportés.
Philippe cherche, se documente, essaie, recommence pour tenter de retrouver enfin les recettes et gestes ancestraux. Comme ce pain exceptionnel « Le Mérelle », un pain du Moyen Age, pour lequel il a consacré six mois de recherches et d’expériences avant de trouver la recette parfaite.
Mais le géant attend son heure. La notice d’utilisation n’est pas livrée avec le Voisins ! lui aussi, il a fallu l’apprivoiser. La quête perdure.
Allumé plusieurs heures avant la cuisson, chauffé jusqu’à 450° puis le laisser se calmer jusqu’à ce que la température retombe à 300°. Seulement à cet instant, le pain scarifié sera enfourné et cuira pendant une heure en chaleur descendante.
…et toujours cette odeur de pain chaud, gorgée d’espérance, qui finit de m’enivrer.
Chacune de ces étapes, effectuées dans le respect des traditions, confèrent aux pains du Moulin de la Peltrie des qualités gustatives exceptionnelles, des arômes savoureux et une excellente tenue de conservation.
Mais ma visite s’achève. Je quitte le moulin comblée et sans pouvoir m’empêcher de penser aux mots si forts de sens que sont alchimie, transmission, rituel, partage. Oui, il y a sans nul doute un esprit de compagnonnage chez ces deux compères.
Un immense merci Philippe et Jean pour m’avoir offert cette parenthèse d’authenticité.
…et cette délicieuse odeur de pain chaud qui ne m’a pas quittée de la journée.