Revenir dans le passé ne serait-ce qu’une heure pour contempler cette Chartreuse du Val-Dieu, c’est la pensée que j’ai eue lors de ma promenade silencieuse et imaginative au milieu de ce qu’il reste de cet ensemble de bâtiments construits par les disciples de Saint-Bruno, il y a plus de huit cents ans.

Les extérieurs de cette Chartreuse (et non abbaye car le moine à la tête de la communauté ne prend jamais le titre d’Abbé mais celui de Prieur), située sur la commune de Feings en plein cœur de la forêt de Réno, sont ouverts au public lors du weekend end des Journées du Patrimoine. Et de l’imagination il faut en avoir pour tenter de reconstituer mentalement ce bel endroit.

Nous sommes en 1170. Rotrou IV, alors Comte du Perche, fils de l’illustre Rotrou III fondateur de l’abbaye de la Trappe, décide d’offrir à une poignée de moines, des terres ainsi qu’un certain nombre de privilèges pour la construction de leur monastère. Ce sont les Chartreux qui viennent et qui choisissent un vallon tellement isolé et sauvage qu’on le surnomme « La Vallée du Diable » ou « Le Désert ». Les Chartreux le baptisent le Val-Dieu et, défiant la nature, entreprennent leur installation.

Les Chartreux : Ordre religieux contemplatif à vœux solennels, de type semi-érémitique, mais laborieuse fondé en 1084 selon la règle de Saint-Bruno. Cet ordre est l’un des plus austères : les religieux observent une clôture perpétuelle, un silence presque absolu, de fréquents jeûnes et l’abstinence complète de viande. Ils ne reçoivent la visite de leur famille que deux jours par an, portent une robe de drap blanc, serrée avec une ceinture de cuir, et un scapulaire avec capuce du même drap. Ils portent en permanence le cilice maintenu à la taille par une corde et ne mènent pas une vie communautaire. Chaque moine vit dans sa cellule individuelle et de ce fait la Chartreuse nécessite un emplacement assez considérable. C’est ce que l’on comprend lorsqu’on déambule dans les extérieurs et qu’on essaie de reconstituer les plans. Pharmacie, boulangerie, chapelle, église, cellules, bibliothèque, cloître … on a des difficultés à imaginer ce que devait être ce monastère qui traversa les siècles, passant successivement par des périodes de prospérité à des périodes de troubles.

Plusieurs fois profané, ravagé par les pillards de la guerre de cent ans et des guerres de religions, les Chartreux se remirent à chaque fois courageusement au travail et œuvrèrent pour la reconstruction de leur monastère. Après ces évènements, il fallu environ deux cents ans pour aboutir à une restauration totale du Val-Dieu.

Mais c’est en quelques années seulement que la Révolution Française eut raison de la Chartreuse. Dépossédés de tous leurs privilèges et droits, les Chartreux que plus rien ne retenait dans ce Val-Dieu et dans la région s’exilèrent. Ce fut le signe de la curée et les révolutionnaires acharnés finir de la dépouiller de son mobilier, ses archives, ses ornements, ses livres, son argenterie mais cette fois ci en complète légalité.

Aujourd’hui encore, on peut retrouver des boiseries, des meubles, autels et toiles dans les églises alentours notamment Loisé, Mortagne-au-Perche, Longny, Champs, Feings. .. Plus difficile de savoir ce que sont devenus les quelques 4 000 volumes de l’immense bibliothèque. Certains sont conservés à Alençon, d’autres à la Bibliothèque Nationale de Paris. La multitude ayant été malheureusement égarée où plus stupidement détruite.

Confisquée, La Chartreuse passa par plusieurs mains successives toutes aussi peu scrupuleuses qu’in intéressées par la conservation de tels bâtiments. Inexorablement, Dame Nature repris ses droits. Il ne reste que le pavillon d’entrée, la Chapelle des Femmes et quelques dépendances sur la gauche en entrant.

Alors oui il faut beaucoup d’imagination pour tenter de visualiser la splendeur de cette Chartreuse surnommée jusqu’au XVIIIè siècle « La Reine du Désert ». Une seule chose peut-être a été conservée et c’est sans nul doute le silence de ce Val-Dieu si propice à la contemplation.

Chartreuse du Val-Dieu

Vue Cavalière de la Chartreuse du Val-Dieu

La Chartreuse du Val-Dieu

La Chartreuse du Val-Dieu

La Chartreuse du Val-Dieu

Le porche de l’entrée de la Chartreuse du Val-Dieu

Détail du porche d'entrée de La Chartreuse du Val-Dieu

Détail du porche d’entrée de La Chartreuse du Val-Dieu

La Chartreuse du Val-Dieu

Sur l’emplacement de ce que fut le cloître de La Chartreuse du Val-Dieu

La Chartreuse du Val-Dieu

Croix symbolisant l’emplacement de l’Eglise de La Chartreuse du Val-Dieu

Détail de la croix qui symbolise l'emplacement de l'Eglise de La Chartreuse du Val-Dieu

Détail de la croix qui symbolise l’emplacement de l’Eglise de La Chartreuse du Val-Dieu

Travel back in time at least an hour to see how the Charterhouse of the Val-Dieu was height hundred years ago; this is the thought I had during my silent and imaginative walk amid the ruins of the set of buildings constructed by the sons of Saint-Bruno, the Carthusians.

The exterior of the Charterhouse located on the town of Feings in the middle of the Reno Forest, are open to the public during the European Heritage Days (just to be precise : the house of the Carthusians is called Charterhouse and not Abbey. The reason is that the monk leading the community has the title of prior ant not abbot). And yes you need to have a lot of imagination to mentally try to rebuild this beautiful place.

Imagine! It was in 1170. Rotrou IV, then Count of the Perche, son of the great Rotrou III founder of the Abbey of La Trappe, decided to offer to a handful of monks, land and privileges building their hermitage. The Carthusians came and choose an isolated and wild valley, nicknamed the « Valley of the Devil » or « the Desert ». They named this area Le Val-Dieu and, defying the forest and the nature, began the construction.

The Carthusians Monks: the order was founded in 1084 by Saint Bruno. Monks live a solitary life at the heart of the hermitage, all dedicated exclusively to the contemplative life. They consecrate their lives entirely to prayer. The rules are silence, solitude, living in cell, frequent fasts and the complete abstinence of meat. Their solitude implies a separation from the world, realized by the enclosure. The visits are limited to their family and relatives two days once or twice a year. They wear a white cloth dress tight with a leather belt and a scapular with a hood of the same material. They always wear the hair shirt held at the waist with a rope. All live a very solitary life of prayer and work, all in cells and that’s why the hermitage requires a considerable location. This is what we understand while waking outside trying to reconstruct the plans of the monastery.
Pharmacy, bakery, chapel, church, cells, library, cloister … it is difficult to imagine what would be the monastery come down through the centuries, passing successively through periods of prosperity through periods of violent unrest.

Several time, the hermitage was desecrated, ravaged by looters in the Hundred Years War and the Wars of Religion. But, the Carthusians resumed every time bravely at work and labored to rebuild their monastery. After these events, it took about two hundred years to reach a total restoration of The Charterhouse of Val-Dieu. But, it’s only in few years that the French Revolution destroyed completely the Chartreuse. Dispossessed of all their privileges and rights, the Carthusians went into exile. It was the sign of the quarry and the revolutionaries, legally this time, finish to strip it of its furniture, archives, ornaments, books … Today we can find the woodwork, furniture, paintings and altars in churches around including Loisé, Mortagne-au-Perche, Longny-au-Perche, Champs, Feings. Harder is to know what the few 4000 books of the amaizing library became. Some are kept in Alençon, others at the National Library in Paris. The major part having been unfortunately lost where more stupidly destroyed.

The Charterhouse of the Val-Dieu was confiscated and passed by successive unscrupulous hands absolutely not interested by the conservation of such buildings. Inexorably, Nature reclaimed its rights. Today, it remains only the entrance, the Chapel of Women and some outbuildings on the left as you enter. So yes it takes a lot of imagination to try to view the splendor of this Charterhouse still nicknamed in the XVIII century « The Queen of the Desert. »
Only one thing may have been preserved: the silence of the Val-Dieu suitable for prayer and meditation.